Sous une apparente simplicité, liée à sa facilité de création et à sa liberté de fonctionnement, l’association recouvre une réalité complexe.
En effet, l’association constitue à la fois une liberté jugée comme fondamentale par notre société et un mode de gestion, c'est-à-dire un outil juridique. De plus, elle évolue souvent aux frontières du secteur public et du marché, en particulier dans le milieu du spectacle vivant.
Le secteur d’activité du spectacle vivant connaît à peu près tous les modes de gestion possibles, qu’ils soient de droit privé (société anonyme, société à responsabilité limité, société d'économie mixte, etc.) ou de droit public (régie directe, régie dotée de la personnalité morale et de l'autonomie financière, établissement public de coopération culturelle, établissement public national, etc.). Toutefois, l’association est la forme juridique la plus employée.
Cette forme connaît en France une grande expansion, et particulièrement dans le secteur artistique et culturel. De 2007 à 2017, le nombre d'associations y est passé de 250 000 à 350 000. Si certaines associations fonctionnent entièrement grâce au bénévolat (voir étude “Bénévolat” ), d’autres emploient régulièrement des salariés. Ce fonctionnement est particulièrement vrai dans le spectacle vivant, où 80% des employeurs sont des associations (v. Tchernonog, L. Prouteau , Les chiffres cultures de l’enquête « Le paysage associatif français, 2019 », Centre d’économie de la Sorbonne ).
Cette étude a pour objet de comprendre l’utilité des associations, leur création et leur fonctionnement juridique, ainsi que de faire un point sur les problématiques liées aux relations qu’elles entretiennent avec les collectivités publiques.
I.Définition, création et fonctionnement de l’association
"L’association est la convention par laquelle deux ou plusieurs personnes mettent en commun, d’une façon permanente, leurs connaissances ou leurs activités dans un but autre que de partager des bénéfices. Elle est régie quant à sa validité, par les principes généraux du droit applicables aux contrats et obligations" (art. 1er de la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d'association ).
L'association constitue donc un contrat.
Par sa déclaration à la préfecture (et sa publication au journal officiel), l'association acquiert la personnalité juridique. Sauf remarques particulières, nous ne traiterons ici que des associations déclarées.
Dans certaines conditions liées à sa durée d'existence, son nombre de membres et son objet, l'association peut également être reconnue d'utilité publique. Ce statut ne modifie pas la nature juridique de l'association mais renforce sa capacité juridique et la soumet à une certaine tutelle administrative.
Étant régie par les principes généraux du droit applicable aux contrats et obligations, la création de l'association est très souple et ses fondateurs disposent d’une pleine liberté pour en arrêter les modalités d’organisation et de fonctionnement.
C’est pourquoi les statuts doivent être rédigés avec le plus grand soin. Il s’agit d’une part, d’ajuster précisément les modalités de fonctionnement aux caractéristiques et contraintes de la structure et d’autre part, de préciser la répartition des pouvoirs entre les différents organes et les modalités de fonctionnement avec les membres (vote, statut…).
a.Création d’une association
L’association peut être créée par toute personne physique ou morale de droit privé ou de droit public et doit comporter au moins 2 membres. Les membres d'une association sont dénommés les sociétaires.
Qui peut créer une association ?
Le contrat d’association est d’abord régi par le code civil. Ainsi, les majeurs, les mineurs émancipés et certains majeurs protégés peuvent conclure ce contrat (articles 1145 et 1146 du Code civil ).
Les mineurs peuvent également créer une association ou être chargés de son administration, sauf pour les actes de disposition (Article 2 bis loi 1901 ).
- La participation est libre pour les mineurs de 16 ans révolus. Le représentant légal doit néanmoins être prévenu par l’association sans délai, et peut s’y opposer ;
- La participation est possible pour les mineurs de moins de 16 ans, sous réserve d’un accord écrit préalable du représentant légal.
Les mineurs peuvent librement devenir membre d’une association (art. 2bis).
La première étape de la création d’une association réside dans la rédaction de ce contrat spécifique, aussi appelé les statuts de l’association (cf. infra E).
1.Création d'une association auprès de la préfecture compétente et publication au Journal officiel
La déclaration de l’association est la première étape administrative de la création d’association. Il s’agit de déclarer les statuts à l’administration pour que la structure juridique ainsi créée bénéficie de la capacité juridique (cf. infra C).
Comment faire la déclaration ?
La déclaration se fait en ligne sur le site du service public . Il est également possible de se rendre ou d’envoyer un courrier au greffe du département du siège social de l’association.
Contenu de la déclaration
Certaines informations et documents sont demandés au moment de la déclaration :
- nom et objet de l’association, adresse du siège social ;
- date de l’assemblée constitutive ;
- liste des dirigeants comportant le titre, les nom, prénom, profession, domicile et nationalité de chacun d’entre eux ;
- un exemplaire des statuts datés, et signés par au moins 2 dirigeants ;
- un exemplaire du procès-verbal d’assemblée constitutive, signé.
Pour plus d’information, voir le site du service public .
Publication au JOAFE
L’objet publié sera tel qu’il apparaît dans la déclaration devant la préfecture. Il faut donc rédiger l’objet avec attention. La préfecture se charge de transmettre directement la demande de publication avec la déclaration. Cette publication est désormais gratuite.
2.Inscription auprès de l'Insee
Toute association qui souhaite bénéficier de subventions publiques ou employer du personnel salarié a l'obligation de s'identifier auprès de l'Insee pour figurer dans le répertoire Sirene.
La demande doit être effectuée auprès de :
- l'Urssaf pour les associations qui souhaitent embaucher ;
- le Greffe du tribunal de commerce pour les associations qui n’embauche pas mais qui exerce des activités soumises à la TVA ou impôt sur les sociétés (voir l’étude Fiscalité des associations) ;
- le portail “Le Compte Asso” ou l’adresse mail sireneasso@contact-insee.fr pour les associations qui n’emploient pas et ne sont pas soumises aux impôts commerciaux, mais qui reçoivent ou souhaitent recevoir des subventions de la part de l’État ou des collectivités territoriales.
Un numéro SIRET et un code APE sont ensuite attribués à l'association.
b.Objet de l’association
L'objet de l'association est l'activité pour laquelle l'association a été constituée.
Conformément au principe de spécialité applicable à toutes les personnes morales, la capacité juridique de l'association est limitée à son objet social, son but statutaire. L'association ne peut donc accomplir que les actes juridiques qui correspondent à son objet.
Il est donc essentiel lors de la rédaction des statuts de veiller à ce que l'objet social vise bien l'ensemble des activités qui seront mises en œuvre (en pratique, cet article des statuts présente souvent dans un premier alinéa les buts essentiels du groupement puis décline, de manière non exhaustive, les moyens d'actions).
1.Interdiction du partage des bénéfices
L’association est un contrat essentiellement caractérisé par son but non lucratif, ce qui la distingue des autres modes de gestion privée, des sociétés commerciales notamment. Si l’association peut réaliser des bénéfices, elle ne peut donc pas les partager entre ses membres. Dans une telle hypothèse, le contrat d’association serait requalifié en société créée de fait.
A l’inverse, une association peut avoir pour objet de faire réaliser une économie à ses membres (la réalisation d’une économie évite un appauvrissement des membres, la notion de bénéfice renvoyant à un gain qui ajoute à la fortune des membres).
2.Possibilité d’exercer des activités économiques ou commerciales
a.Activité à caractère économique, et éventuellement commerciale
La notion d’activité économique a été développée par la jurisprudence et n’est pas très clairement délimitée. La jurisprudence communautaire a adopté une définition très large, correspondant à la plupart des activités de spectacles vivants : l’offre de biens ou de services sur un marché donné, ne se rattachant pas à des prérogatives de puissance publique.
Les principales conséquences d’une activité à caractère économique sont la soumission au droit de la concurrence, et en particulier à la réglementation communautaire des aides d’État et aux dispositions du Code de commerce relatives à la liberté des prix et de la concurrence, et à la prohibition des pratiques anticoncurrentielles.
Le caractère économique de l’activité emporte également une obligation d’établir des comptes annuels (bilan, compte de résultat et annexe), de nommer un commissaire aux comptes lorsque cette activité dépasse certains seuils, et la soumission au régime des conventions réglementées.
En outre, l’association qui souhaite vendre de manière habituelle des produits ou des services doit l’avoir prévu dans ses statuts (art. L442-10 du Code de commerce ). À défaut, elle s'expose à des sanctions pénales (contravention de 5ème classe, art. R442-4 du Code de commerce ) et administratives (suppression de subvention et retrait d’agrément).
Certaines activités économiques peuvent être qualifiées de commerciales par nature, il s’agit notamment de toute entreprise de spectacles publics (art. L110-1 du Code de commerce ).
Si l’objet même de l’association est l’entreprise de spectacles publics et que cette activité est menée de manière spéculative, c’est-à-dire animée par la recherche d’un profit, l’association perd son statut de droit civil pour devenir commerçante. Cela implique la compétence des juridictions commerciales et l’application du Code de commerce.
Il a pu ainsi être jugé que l’exploitation d’une salle de théâtre avait un caractère commercial (CA Paris, 3 juillet 1996).
b.Association menant une activité professionnelle
L’activité professionnelle est celle qui a lieu contre rémunération.
Ont par exemple été reconnues comme activités professionnelles les activités suivantes :
- la tenue de cours d'art dramatique et la présentation de spectacles (CA Paris, 11 mai 2006. 05-17418. Inédit) ;
- l'édition de revues ;
- l'enseignement de la guitare (Cass, civ. 23 mars 1999 ).
La principale conséquence en est que l’association est alors soumise aux obligations mises à la charge des professionnels par le Code de la consommation.
Pour l’essentiel il s’agit d’obligations d’information et de conseil, de conformité aux prescriptions en vigueur et de sécurité.
c.Capacité juridique de l’association
La capacité juridique de l’association varie selon le type d’association créée.
Il existe 3 catégories principales d’association.
1.Association non déclarée en Préfecture
Simple contrat, l'association non déclarée ne dispose pas de la personnalité juridique. Une structure sans personnalité juridique n'est pas individualisable et n'a pas de capacité juridique, ce qui implique notamment l'impossibilité de conclure des contrats et de percevoir des subventions publiques.
2.Association déclarée en Préfecture
L'association déclarée en Préfecture acquière la personnalité juridique après insertion d’un extrait de sa déclaration en Préfecture au Journal officiel. Elle dispose de la capacité juridique et de son propre patrimoine qui est distinct de celui de ses membres.
L'association déclarée peut recevoir des dons manuels (numéraires, chèques et objets mobiliers).
En revanche, elle ne peut bénéficier de :
- dons immatériels (par exemple des droits d'auteur) ;
- dons portant sur des biens immeubles ;
- donations et legs.
3.Association reconnue d'utilité publique
Cette reconnaissance ne peut être accordée qu’à des associations déclarées ayant un caractère d’intérêt général, disposant au moins de 200 membres privés et fonctionnant depuis au moins trois ans. Elle est accordée par décret après avis du Conseil d’Etat. Ces associations doivent adopter des statuts types.
La reconnaissance d’utilité publique confère un certain nombre d’avantages - possibilité de recevoir des libéralités et legs - mais la procédure est longue et complexe, et l’association fonctionne alors sous la tutelle de l’administration.
d.Obligations de l’association
1.Respect des statuts
La rédaction des statuts est très libre. Toutefois, dès lors qu'ils sont rédigés et déclarés, l'association a l'obligation de les respecter : les statuts constituent la loi de l'association.
Toute décision prise en violation des statuts est nulle. Sauf stipulations statutaires contraires, la tenue de procès verbaux des délibérations des organes de l’association n’est pas obligatoire. En pratique, elle est toutefois indispensable pour rapporter la preuve des décisions adoptées.
2.Modification des statuts
a.Décision des modifications
Les modifications des règles de l'association sont libres. Il convient toutefois de se référer aux règles de prise de décision prévues dans les statuts. A défaut, les changements sont adoptés à la majorité des membres présents et représentés.
b.Obligation de déclaration de certains changements
L’association doit déclarer à la Préfecture dans un délai de 3 mois (art. 5 al. 5 de la loi du 1er juillet 1901) :
- les modifications statutaires ;
- le changement d’adresse de son siège social (si le siège social est transféré dans un autre département, la demande de modification doit se faire auprès de la préfecture dont relève le nouveau siège) ;
- la création de nouveaux établissements ;
- et les modifications intervenues dans son administration.
La déclaration modificative est établie sur papier libre et doit être signée par le président de l'association et par l'un ou plusieurs membres du bureau.
Les modifications relatives à l'objet social, la dénomination sociale et au siège social doivent être déclarées en ligne ou par le billet du formulaire Cerfa n°13972*01 (par courrier ou sur place).
A défaut de déclaration, ces modifications sont inopposables aux tiers et les personnes en charge de l’administration ou de la direction s’exposent à une amende pouvant aller jusqu’à 1 500 euros (art. 8 de la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d'association).
3.Obligations comptables
Lorsqu'une association bénéficie de subventions publiques (par exemple, d'une aide à la création attribuée par la Direction régionale des affaires culturelles), elle doit fournir ses comptes et ses budgets à l'autorité administrative. En outre, elle doit pouvoir justifier l'ensemble des dépenses effectuées.
Les associations qui bénéficient d'une aide publique annuelle supérieure à 153 000 euros doivent établir chaque année, un bilan, un compte de résultat et une annexe. Elles ont également l'obligation de nommer un commissaire aux comptes (art. L612-4 et D612-5 du Code de commerce).
Cette déclaration est gratuite (depuis le 1er janvier 2020) et doit se faire en ligne .
L'ensemble des documents comptables et des pièces justificatives doivent être conservés pendant un délai de 10 ans (art. L123-22 du Code de commerce ).
e.Rédaction des statuts
1.Liberté statutaire
L’association est librement organisée. Les statuts constituent la loi de l'association et ils s’imposent à tous une fois adoptés. Par conséquent, il est impératif qu’ils soient adaptés au fonctionnement de la structure et qu’ils précisent sans ambigüité les points essentiels tels que la répartition des pouvoirs et les modalités de vote.
Les membres fondateurs doivent donc en premier lieu définir les caractéristiques souhaitées de l'association (association ouverte ou fermée, fréquence des réunions des organes collégiaux, pouvoirs respectifs des organes, etc.) avant de rédiger et de voter les statuts.
Chaque cas étant particulier, le recours à des statuts types n’est en principe pas souhaitable.
2.Points importants à mentionner dans les statuts
La dénomination sociale de l’association. Le choix de la dénomination sociale est libre. Toutefois, il convient de s'assurer que la dénomination choisie est disponible, c'est-à-dire :
- qu'elle ne fait pas l'objet de droits antérieurs (par exemple une protection par le droit des marques ou par le droit d'auteur) ;
- ou qu'elle n'est pas déjà utilisée par une association ayant la même activité. En effet, toute association dispose d'un droit privatif sur son nom qui lui permet de s'opposer à la reprise de celui-ci par une association exerçant dans le même domaine d'activité. Pour vérifier que la dénomination sociale est libre, il est possible de se renseigner auprès des greffes et des préfectures de la région.
Une fois le nom choisi, l'association peut à son tour faire valoir :
- soit un droit de propriété exclusif si la dénomination a été déposée à titre de marque ou si elle est assez originale pour être protégée par le droit d'auteur ;
- soit, si la dénomination ne fait pas l'objet d'un droit exclusif, d'un droit privatif : il est possible d'interdire à une autre structure d'utiliser la même dénomination sociale si cela créé un risque de confusion dans l'esprit du public.
L'objet social. Comme il a été indiqué plus haut, la rédaction de l'objet social est fondamentale : il n'y a pas d'activité possible au-delà de ce qui est mentionné dans les statuts. Par conséquent, si la clause relative à l'objet social est trop étroite, elle peut handicaper l'association. Par exemple, une association qui a pour objet la production de spectacles ne peut pas faire de la diffusion si elle ne l'a pas stipulé dans ses statuts. En effet, les actes effectués au sein d'une association qui ne correspondent pas à l'objet social de l'association peuvent être frappés de nullité. De même, les administrateurs et dirigeants d'une association qui agiraient en dehors de l'objet social de l'association engageraient leur responsabilité personnelle (et pas uniquement celle de l'association).
L'objet social prévu dans les statuts correspond à l'activité principale de l'association. Dès lors que l'objet social indique une activité de production, de diffusion de spectacles ou d'exploitation d'un lieu de spectacles, il est indispensable de demander la licence d'entrepreneur de spectacles correspondante (sur ce point, se reporter à l'étude "Licence d'entrepreneur de spectacles" ).
Un code APE (activité principale de l'entreprise) est attribué à l'association en fonction de son objet social. Pour la diffusion et la production de spectacles, le code APE est 90.01Z. Pour l'exploitation d'un lieu de spectacles, le code qui correspond à l'activité principale est 90.04Z.
Par ailleurs, les activités économiques exercées à titre habituel doivent être expressément mentionnées dans les statuts (art. L442-10 du Code de commerce ). Ainsi, une association qui produit des spectacles et qui les "vend" auprès des lieux de diffusion doit prévoir cette activité de vente dans ses statuts.
Attention, s'il y a une activité principale et des activités accessoires, il peut être intéressant de bien spécifier ce qui relève de l'activité principale et ce qui relève de l'activité accessoire. Ceci peut notamment avoir une importance lorsque ces activités accessoires sont exercées à titre lucratif et commercial et que l'association a sectorisé ses activités ; pour ne pas remettre en cause le caractère non lucratif de l'activité principale lorsque c'est le cas (pour plus de précisions, se reporter à l'étude "TVA : sectorisation et filialisation" ).
Le siège social. L’adresse précise n’est pas obligatoirement mentionnée dans les statuts. Il est en effet possible d'indiquer la ville sans autre mention, ce qui permet en cas de changement de lieu dans la même localité de ne pas avoir à faire de modification statutaire. Toutefois, la déclaration à la Préfecture doit mentionner l'adresse exacte du siège de l'association.
La durée de l’association. Elle peut être limitée ou illimitée.
Les ressources de l'association (cf. infra F). Il s'agit en général des cotisations, dons manuels, apports, prêts et subventions, ainsi que des ressources générées par les activités de l’association. La mention "et toutes autres ressources autorisées par la loi" permet de ne pas limiter les ressources potentielles de l'association.
La définition des différentes catégories de membres et de leurs droits respectifs. L’association peut être composée de plusieurs catégories de membres (membres fondateurs, membres actifs, bienfaiteurs, etc.) disposant de droits différents (seule une partie des membres disposant du droit de vote ou étant éligible, par exemple). Ces catégories n'étant pas juridiquement définies, il convient de prévoir pour chacune d'elles les conditions à remplir pour en faire partie.
Par ailleurs, les modalités d’acquisition de la qualité de membre (adhésion libre ou subordonnée à une qualité professionnelle et/ou à un agrément par exemple) ainsi que la durée d’adhésion (à défaut de précision l’adhésion est valable pendant toute la durée de l’association même en cas de cotisation annuelle) doivent être précisées. Ces questions sont très importantes puisqu’elles permettent de déterminer les personnes disposant du droit de vote à un moment donné et donc de définir l’assiette électorale.
La définition des instances de l’association. En général, bien que cela ne soit ni obligatoire ni nécessairement pertinent, l’association comprend une assemblée générale, un conseil d’administration et un bureau. Ainsi, nombre de petites associations sont organisées selon ce schéma, alors même que ces organes regroupent les mêmes personnes, ce qui peut entrainer des lourdeurs dans la prise de décision.
- Si tel est le cas, il peut être opportun de ne pas prévoir d'assemblée générale annuelle, le conseil d’administration cumulant alors les pouvoirs classiquement dévolus à cette instance et ceux propres à l'assemblée générale.
- L'existence d'un conseil d'administration en plus d'un bureau, quand les deux sont dévolus aux mêmes personnes, peut sembler superflue.
- Pour les associations en relation avec des collectivités publiques, les statuts peuvent instituer une gouvernance du type conseil de surveillance / directoire. Ce schéma permet de dissocier clairement les fonctions politique et de contrôle de celles de gestion. Dans ces conditions, les représentants des collectivités publiques peuvent siéger au sein du conseil de surveillance en évitant les risques liés à la gestion de fait de fonds publics.
La composition et les pouvoirs respectifs de ces organes. En général, l’assemblée générale est l’organe souverain, le conseil d’administration assure la gestion courante et le bureau exécute les décisions du conseil.
Les modalités de réunion des instances collégiales. Il s'agit de la fréquence, des modalités de convocation et de définition de l’ordre du jour, etc.
Les modalités de vote. Nécessité ou non d’un quorum, votes pris en compte (membres présents ou représentés, suffrages exprimés, etc.), procédure (vote à main levée ou non, etc.).
Les modalités de modifications des statuts et de dissolution de l'association. A défaut de précision quant à la majorité requise, ces décisions peuvent être subordonnées à un vote à l’unanimité.
3.Règlement intérieur
Les statuts peuvent être complétés et précisés par un règlement intérieur. Le règlement intérieur s'impose comme les statuts à l'ensemble des membres de l'association mais à la différence de ceux-ci il peut être modifié avec beaucoup plus de souplesse sans qu'une procédure de déclaration à la préfecture ne soit nécessaire.
Il est donc opportun de faire figurer dans le règlement intérieur tous les points qui sont susceptibles d'être fréquemment modifiés au cours de la vie de l'association (comme par exemple le montant des cotisations, l'organisation de festivités, l'utilisation des locaux, etc.).
Le règlement intérieur ne peut contredire les statuts. Il ne doit pas être confondu avec le règlement intérieur qui s'impose aux entreprises de plus de 20 salariés et qui fixe les règles relatives à l'hygiène, la sécurité et la discipline (voir étude "Règles de sécurité et d'hygiène au travail" ).
f.Ressources financières de l'association
1.Capacité à recevoir des financements
Toutes les associations peuvent percevoir des financements. Attention cependant, car il existe des limites à cette perception :
- l'association n’existe que dans les limites de son objet social. Par conséquent, elle ne peut percevoir des financements que dans la mesure où ils sont affectés au financement de son activité. Lors de la rédaction des statuts, il faut donc toujours faire attention au contenu de l’objet social car celui-ci peut être un frein à la perception de ressources ;
- l'association déclarée (i.e association loi de 1901) dispose d’une petite capacité juridique, ce qui signifie qu’elle ne peut pas recevoir de dons autres que des dons manuels. Ainsi, tout ce qui ne peut pas faire l’objet d’une remise de la main à la main, tels que des droits d’auteur ou des biens immobiliers, ne peut être donné à une association déclarée, sous peine de nullité absolue.
2.Capacité à financer
Toute personne peut-elle financer une association ? En dehors des personnes morales de droit public (collectivités territoriales, EPCC, EPA, etc.), aucune disposition légale n’interdit à une personne d’apporter des ressources privées à une compagnie ou un lieu de diffusion constitué sous forme associative.
Peut-il y avoir des incidences lorsqu’un salarié (comédien, metteur en scène, directeur artistique, etc.) finance l'association par laquelle il est employé ? Si un salarié de la compagnie ou du théâtre apporte ses fonds propres pour aider à la réalisation d’un projet artistique, ce qui peut par exemple être le cas lorsqu’un metteur en scène, directeur artistique ou comédien souhaite voir une création aboutir, il peut éventuellement y avoir une incidence au regard de l’assurance chômage. En effet, si un salarié verse de l’argent à sa structure employeur, Pôle emploi pourrait considérer cet acte comme un élément caractérisant la qualité de dirigeant de fait, ce qui remettrait en cause le lien de subordination du salarié et par conséquent la perception de ses allocations chômages. La qualification de dirigeant de fait résultant de la méthode du faisceau d’indices utilisée par Pôle emploi, il est difficile d’apporter une réponse définitive dans cette situation.
Par ailleurs, on peut aussi se poser la question du salarié d’une compagnie ou d’un théâtre qui fait un don à son association et qui souhaite bénéficier d’une réduction d’impôt. Dans cette situation, il pourrait être considéré que la perception du salaire par le salarié est une contrepartie du don, ce qui exclurait ainsi l’application du régime du mécénat. A ce jour, nous n’avons pas de retour sur la position de l’Administration.
3.Différents types de ressources financières de l'association
a.Apports
Définition. L'apport à une association est un acte à titre onéreux et a pour contrepartie des contreparties morales uniquement (contrairement aux apports aux sociétés commerciales pour lesquelles l'apport est rémunéré par le biais de parts sociales).
Il peut porter sur une somme d'argent (apport en numéraire), sur des biens meubles corporels ou incorporels, des biens immeubles (apports en nature) ou sur des connaissances, un savoir-faire (apports en industrie).
L'apport peut être effectué :
- en pleine propriété. Dans ce cas, l'apport entre dans le patrimoine de l'association. Les corollaires de ce transfert de propriété sont le transfert de la responsabilité et du risque sur la chose : dans le cas où l'apporteur prévoit un droit de reprise, il prend donc le risque que la chose apportée soit abîmée ou perdue ;
- ou en usufruit. Dans cette situation, l'association n'est pas propriétaire mais bénéficie de l'usage et de la jouissance de l'apport pendant la durée consentie par l'apporteur (l'usufruit accordé à une association ne peut pas dépasser 30 ans (art. 619 du Code civil ).
Contrairement aux dons et legs, l'apport est un acte à titre onéreux. Toutefois, la contrepartie de l'apport n'est pas un prix, il s'agit d'une contrepartie morale (par exemple la qualité de membre). Pour que l'opération soit qualifiée d'apport, la jurisprudence exige que cette contrepartie morale soit réelle et substantielle (Cass, com. 7 juill. 2009. n°07-21957. Inédit).
L'apporteur peut exiger que son apport soit :
- affecté à une opération particulière. Si l'association ne respecte pas la condition d'affectation l'apporteur peut alors exiger la résolution du contrat et récupérer son apport ;
- assorti d'un droit de reprise (également appelé droit de retour), ce qui lui permet de récupérer la chose dans les conditions prévues au contrat. Ce droit de retour doit être formalisé par écrit.
Formalisme. Seul l'apport d'un bien immeuble est soumis à un formalisme particulier (notamment rédaction d'un acte devant notaire, et publication au bureau des hypothèques, déclaration dans les 3 mois à la préfecture du lieu du siège social de l'association bénéficiaire). Les autres apports ne sont soumis à aucune condition de forme.
Toutefois, il est toujours conseillé de rédiger un contrat d'apport, notamment pour :
- justifier qu'il ne s'agit pas d'un don manuel (la distinction entre le don manuel et l'apport n'est pas toujours facile à faire, cependant elle est indispensable car ces 2 financements n'ont pas le même régime juridique) ;
- le cas échéant, définir les modalités d'exercice du droit de reprise ;
- préciser l'affectation de l'apport ;
- définir la contrepartie morale accordée.
Fiscalité. L'apport ne fait l'objet d'aucune déclaration spécifique auprès de l'Administration fiscale.
L'apport n'est en principe pas soumis à TVA mais il entre dans l'assiette pour le calcul de l'impôt sur les sociétés lorsque l'association est fiscalisée.
Dans certains cas, l'apport peut être soumis à un droit d'enregistrement (voir les art. 810 du Code général des impôts et art. 680 CGI ). Il convient de vérifier au cas par cas s'il faut procéder à un enregistrement et si des droits sont à verser.
b.Prêts
Définition. Une association peut également demander à une personne physique ou une personne morale de lui prêter une somme d'argent ou un bien meuble corporel. Le contrat de prêt n'emporte ni transfert de propriété, ni transfert de responsabilité, ni transfert de risque sur la chose. Le prêt peut se faire à titre gratuit ou à titre onéreux (il est possible de prévoir des intérêts).
Le prêt entre personnes morales ou physiques est possible sans que le monopole des établissements de crédit ne soit remis en question, dès lors qu'il s'agit de prêts occasionnels.
Formalisme. Lorsque le contrat de prêt porte sur une somme supérieure à 5000 euros, l'association débitrice doit le déclarer auprès de l'Administration fiscale avant le 15 février de l'année N+1 sur le formulaire 2062 (Cerfa N° 10142 * 07) (article 23 L ). Si plusieurs contrats de prêts d’un montant unitaire inférieur à 5000 euros sont conclus au cours d’une année au nom d’un même débiteur ou d’un même créancier et que leur total en principal dépasse 5000 euros, tous les contrats ainsi conclus doivent être déclarés.
A défaut de déclaration dans les délais prévus, le prêteur est passible d'une amende de 150 euros (article 1729 B du CGI ).
Fiscalité. Le prêt n'est jamais soumis à TVA (les intérêts sortent du champ d'application de la TVA). Il n'entre pas non plus dans l'assiette de calcul de l'impôt sur les sociétés (ce n'est pas un produit imposable).
c.Subventions publiques
Définition. La subvention publique peut être définie comme l'octroi par une personne publique (État, région, département, ville, établissement publique, services déconcentrés de l’État comme la DRAC, etc.) d'une contribution financière à un organisme privé. La subvention ne doit faire l'objet d'aucune contrepartie au profit de la personne publique et doit être accordée de manière discrétionnaire.
Conditions pour recevoir une subvention publique. Pour pouvoir recevoir une subvention publique l'association doit être dotée de la personnalité juridique et bénéficier d'un numéro SIRET (le numéro SIRET est notamment attribué lors de l'identification de la structure auprès de l'Urssaf).
Demande de subvention. La demande de subvention doit être établie sur le document Cerfa n°12156*03 ( ). Toutefois, il arrive parfois que les collectivités territoriales disposent de leur propre dossier, notamment lorsque la demande de subvention porte sur un faible montant. Avant de faire la demande, il convient donc de se renseigner auprès de l'organisme visé.
Subventions publiques et TVA. Sur la question de la TVA applicable aux subventions, se reporter à l'étude "TVA : taux" ( ).
d.Dons manuels
Définition. Le don manuel a pour objet un bien pouvant être remis de la main à la main. Le don manuel peut ainsi porter sur de l'argent ou des biens en nature (décors, costumes, matériel informatique, etc.). En revanche, il ne peut porter sur un bien immatériel (par exemple des droits d'auteur) ou un bien immobilier, car ils ne peuvent pas faire l'objet d'une remise de la main à la main. L'élément essentiel du don est l'intention libérale, c'est-à-dire que le donateur décide de soutenir sans recherche de contrepartie.
L’exigence d’une remise de la main à la main s’est assouplie avec l’apparition de biens dématérialisés : le don manuel peut prendre la forme d’un virement de compte à compte (Cass, com. 19 mai 1998 ), ou encore de la remise d’un chèque.
Formalisme. Toute association déclarée peut recevoir des dons manuels (art. 6 de la loi du 1er juillet 1901). Les dons manuels ne nécessitent pas la rédaction d'un acte authentique (une simple attestation de don librement rédigée est suffisante).
Déclaration du don manuel auprès de l'Administration fiscale. Il n'est pas obligatoire de porter un don à la connaissance de l'Administration fiscale. Tant que l'Administration n'en a pas connaissance aucun droit de mutation à titre gratuit n'est dû.
Toutefois, dès lors que le don manuel est porté à la connaissance de l'Administration fiscale le donataire dispose d'un délai d'1 mois pour en faire la déclaration en remplissant le formulaire Cerfa n°11278*12 (art. 635 A du Code général des impôts ). La déclaration entraîne alors la soumission du don aux droits de mutation à titre gratuit selon le même barème que les autres donations, soit 60% de la valeur du don dans le cas où il n'existe aucun lien de parenté entre le donateur et le bénéficiaire (art. 757 du Code général des impôts ).
Le don peut être porté à la connaissance de l'Administration et donc être soumis à taxation dans les cas suivants (art. 757 du Code général des impôts ) :
- soit lorsque le donataire le révèle à l'Administration. Pour la Cour de cassation, la révélation doit être volontaire. Ainsi, la seule vérification de la comptabilité par des contrôleurs fiscaux faisant apparaître l'existence de dons ne permet pas de les soumettre à taxation (Cass, com. 15 janv. 2013 "Mais attendu que l'arrêt constate que l'association n'avait rien révélé volontairement à l'administration et que seule la vérification de sa comptabilité, par les contrôleurs, avait fait apparaître les dons manuels litigieux ; que la cour d'appel en a déduit à bon droit que la procédure de vérification de comptabilité mise en œuvre ne pouvait être le support de l'appel des droits de donation") ;
- soit lorsqu'il fait l'objet d'une reconnaissance judiciaire, c'est-à-dire lorsqu'il est reconnu par un juge dans une décision (Cass, soc. 12 oct. 2010 ) ;
- soit lorsqu'il est reconnu par le donataire dans un acte soumis à enregistrement.
Dons et mécénat. Dans certains cas, les dons peuvent ouvrir droit au régime fiscal du mécénat. Ce régime permet :
- au donateur (entreprise ou particulier) de bénéficier d'une réduction d'impôt sur le revenu ou sur les sociétés ;
- au donataire d'échapper aux droits de mutation à titre gratuit.
Pour tout savoir sur les conditions d'application du régime du mécénat se reporter au point II. A de l'étude "Mécénat" ( ).
e.Donations et legs
La donation entre vifs est définie comme "un acte par lequel le donateur se dépouille actuellement et irrévocablement de la chose donnée en faveur du donataire qui l'accepte" (art. 894 du Code civil). Elle doit être passée devant notaire, sous peine de nullité.
Le legs est la transmission à titre gratuit d'un ou plusieurs biens du défunt, faite de son vivant par testament, mais qui ne prendra effet qu'à son décès.
Le legs se distingue de la donation qui prend effet du vivant du donateur et est irrévocable.
Contrairement aux dons manuels, la donation et le legs ne peuvent bénéficier qu'à certaines associations. Il s'agit notamment des associations reconnues d'utilité publique et des associations établies en Alsace-Moselle.
Sauf cas d'exonérations, les donations et legs sont soumis à des droits de mutation.
g.Modification de l'association en une autre structure
L'interdiction du partage de bénéfice empêche une association de se transformer en société commerciale (en SARL par exemple).
Toutefois, depuis 2001 il est possible de transformer une association en SCOP (Société coopérative de production), ce qui peut être justifié par exemple en cas d'évolution du projet associatif (notamment lorsqu'il devient l'affaire des salariés de l'association). La transformation n'entraîne pas le changement de personnalité morale et permet donc notamment de maintenir les contrats de travail (art. 36 de la loi du 17 juillet 2001 ).
Les associations intéressées par le changement de statut peuvent s'adresser à l'une des unions régionales du réseau Scop Entreprises afin de bénéficier d'une aide au montage de dossier.
h.Dissolution de l'association
Types de dissolution. Généralement les statuts prévoient les conditions de dissolution de l'association. Ainsi, l'association peut prendre fin à l'expiration de la période prévue pour sa durée, à la réalisation du but pour lequel elle a été créée (par exemple, il est possible de constituer une association de production de spectacles seulement pour la durée de la création d'une pièce de théâtre), ou en cas de décision des membres de mettre un terme à la vie de la structure (dissolution volontaire).
Formalités à accomplir. La dissolution volontaire doit être décidée en assemblée générale selon la procédure fixée par les statuts. Lors de l'assemblée générale un liquidateur doit être mandaté. Il sera seul compétent pour représenter l'association durant sa liquidation et réaliser les actes nécessaires (les anciens dirigeants n'ont plus aucun pouvoir de représentation).
Ensuite, si l'association est déclarée, il faut effectuer une déclaration de dissolution auprès de la Préfecture compétente. La dissolution peut être déclarée en ligne ( ). Il est également possible d'en informer la Préfecture par le biais du formulaire Cerfa 13972*2 ( ).
La publication de la dissolution au Journal officiel (ou en Alsace-Moselle, dans un journal d'annonces légales) est possible, mais pas obligatoire (sauf en Alsace-Moselle).
Par ailleurs, lorsque l'association dispose d'un numéro d'immatriculation (ce qui est notamment le cas des associations qui emploient des salariés ou qui perçoivent des subventions) elle doit informer la direction régionale de l'Insee compétente de la dissolution.
Effets de la dissolution. La dissolution met fin à la vie de l'association et entraîne la liquidation de ses biens. Les biens sont dévolus conformément à ce qui est prévu par les statuts ou, à défaut de précision statutaire, suivant les règles définies en assemblée générale (art. 9 de la loi du 1er juillet 1901).
Sort du patrimoine. Les biens acquis et les bénéfices réalisés par l'association ne peuvent pas être répartis entre les sociétaires (art. 15 du décret du 16 août 1901 "Lorsque l'assemblée générale est appelée à se prononcer sur la dévolution des biens, quel que soit le mode de dévolution, elle ne peut, conformément aux dispositions de l'article 1er de la loi du 1er juillet 1901, attribuer aux associés, en dehors de la reprise des apports, une part quelconque des biens de l'association"). En général, ils sont attribués à des associations exerçant la même activité.
Les sociétaires ne peuvent récupérer que les biens qu'ils ont apportés à l'association. Si les apports ont fait l'objet d'une convention prévoyant un droit de reprise, la reprise est alors automatique. Si ce n'est pas le cas, il faut se référer à ce que prévoient les statuts en matière de récupération des apports. Et si rien n'est prévu dans les clauses statutaires c'est l'assemblée générale qui décide de leur devenir.
II.Relations associations – collectivités publiques
Dans le secteur du spectacle vivant, les relations liant les associations aux collectivités publiques sont nombreuses, variées et de plus en plus complexes.
Elles prennent différentes formes : soutien apportée par la collectivité (mise à disposition et/ou subvention), participation de la collectivité à la vie de l’association, conclusions de marchés publics ou de délégations de services publics.
En soi, aucune de ces relations n’est juridiquement critiquable. Ainsi, et sous réserve que l’objet de l’association réponde à un intérêt communal, rien ne s’oppose à ce qu’une commune soit membre d’une association, ou encore soutienne son action par le biais de subventions ou la mise à dispositions de locaux.
Ces relations restent malgré tout à risque, en particulier s’agissant des associations culturelles assurant une mission d’intérêt général, menant parfois des activités de service public, et bénéficiant à ce titre de concours publics. Elles sont donc soumises aux règles visant à garantir la transparence et la bonne utilisation des fonds publics (loi dite Sapin du 29 janvier 1993 instaurant une procédure de mise en concurrence pour les délégations de service public, Code général des collectivités publiques et Code des marché publics).
Le droit européen de la concurrence vient également questionner la légalité des pratiques en vigueur en matière d’aides publiques (Circulaire dite Fillon du 18 janvier 2010, relative aux relations entre les pouvoirs publics et les associations).
Il convient donc de bien cerner les différents contrats pouvant lier les associations aux collectivités, les caractéristiques et les risques liés à une association transparente, ainsi que la question de la légalité des aides publiques aux associations menant des activités de service public culturel.
a.Nature des contrats liant l’association aux collectivités publiques
1.Différentes catégories de contrats
En ce qui concerne l’examen des contrats passés entre les collectivités et une association, la distinction est simple, en théorie :
- la subvention constitue un soutien apporté par une collectivité territoriale à une association pour une activité entrant dans son champ de compétences. Ses conditions d'utilisation peuvent être formalisées par une convention d'objectifs ;
- le marché public est le contrat par lequel la collectivité commande une prestation de service ou un bien, afin de satisfaire un de ses besoins, en contrepartie d’une rémunération forfaitaire ;
- la délégation de service public est le contrat par lequel la collectivité confie la gestion d’un service public à un organisme, la rémunération du délégataire étant liée aux résultats de l’exploitation.
Les activités de spectacles vivants peuvent constituer des missions d'intérêt général, voir des missions de service public. En conséquence, dès lors que l'activité de l'association relève d'une initiative privée, il convient de s'interroger sur l'applicabilité des règles de la commande publique.
Cette question est plus complexe dans les cas où les associations constituent des instruments de coopération entre plusieurs personnes publiques.
Enfin, la nature des équipements et leurs modalités de mise à disposition constituent un indice très important. En effet, la mise à disposition à titre exclusif d’équipements appartenant au domaine public n’est possible que dans le cadre d’une délégation de service public.
La distinction des différentes catégories de contrat est d’importance puisque s’il ne s’agit pas d’une subvention ou d’une convention d’objectifs, les règles de la commande publique rendant obligatoires la publicité et la mise en concurrence des cocontractants s’appliquent.
2.Distinction délégation de service public (DSP) / marché public
A la différence de la DSP, le marché public n’est pas un contrat spécifiquement conçu pour la gestion d’un service public. Il peut se distinguer de la DSP par le degré d’autonomie laissé au cocontractant de l’administration dans la gestion du service.
Pour schématiser, dans le cas du marché public, la collectivité paie un prestataire pour qu’il fasse quelque chose pour elle, tandis que, dans le cas d’une délégation de service public, le cocontractant agit à la place de la collectivité.
La distinction entre marché public et DSP se fonde sur 2 critères :
- l’existence préalable d’un service public porté par la personne qui délègue (la collectivité publique) ;
- et une rémunération substantiellement assurée grâce aux résultats de l’exploitation du service, ce qui suppose que le délégataire (l’association) assume un réel risque d’exploitation (voir notamment CE, 7 nov. 2008, Département de la Vendée, n°291794).
Hormis le cas des subventions, les possibilités de se soustraire aux règles de publicité et de mise en concurrence préalables sont limitées, le principe étant celui de l’application des règles de la commande publique.
Comme a pu le rappeler le Conseil d’Etat, 3 exceptions sont envisageables (CE Sect., 6 av. 2007, Commune d’Aix-en-Provence, n°284736) :
- l’exception tirée de ce que le cocontractant de la personne publique n’est pas un opérateur sur un marché concurrentiel, en raison de la nature de ses activités et des conditions selon lesquelles il les exerce. Les conditions de cette exception sont imprécises, et, en pratique, nous ne connaissons pas de cas où le juge l’a expressément admise ;
- l’exception tirée de ce que les activités procèdent d’une initiative privée ;
- l’exception dite "in house", qui suppose l’exercice d’un contrôle très étroit des personnes publiques sur leur cocontractant (contrôle comparable à celui exercé par cette dernière sur ses propres services, et activité de l’association principalement consacrée à la satisfaction des besoins de la personne publique).
La gestion des activités d’un théâtre est assez rétive à l’application des règles de la commande publique, mais pourtant, en droit, la gestion déléguée d’une activité de spectacle vivant peut passer par la passation d’un marché public.
b.Associations transparentes
L’association transparente renvoie à la notion de démembrement de service public et aux cas dits de "faux nez de l’administration". Il s’agit des associations au travers desquelles agissent des personnes publiques, le recours à la forme associative ayant pour résultat d’éluder les règles du droit public et de la comptabilité publique.
Une association transparente est considérée comme une fiction juridique et cela emporte des conséquences importantes.
1.Critères de la transparence
Dans sa décision du 21 mars 2007 (CE, Commune de Boulogne-Billancourt, n°281796), le Conseil d’Etat a fixé les trois conditions cumulatives suivantes : création à l’initiative d’une personne publique ; contrôle par cette dernière de l’organisation et du fonctionnement ; ressources essentiellement procurées par la personne publique.
Ainsi, le Conseil d’Etat a pu juger que des associations d’animation de quartier étaient transparentes dans la mesure où celles-ci avaient été "créées à l'initiative de la commune qui en contrôlait l'organisation et le fonctionnement et qui leur procurait l'essentiel de leurs ressources" (CE, 14 octobre 2009, M. A. c/ commune de Marseille, n°299554).
2.Risques liés à la transparence
Dénuée d’autonomie, la structure transparente est assimilée à la personne publique et son régime juridique lui sera largement applicable, ce qui peut avoir les conséquences suivantes :
- les actes de la structure transparente seraient réputés émaner de la personne publique qui la contrôle, ce qui peut notamment entraîner la compétence de la juridiction administrative et la qualification des conventions passées par l’association en contrats de droit public ;
- l’attribution de subventions à une association transparente serait constitutive d’une gestion de fait de fonds publics, de même que la perception de certaines recettes, par exemple d’une billetterie, par la structure transparente (CE Avis, 13 février 2007, n°377788) ;
- l’association serait un pouvoir adjudicateur, ce qui implique de passer les achats dans le respect des principes de la commande publique ;
- les salariés de l’association pourraient être considérés comme des agents publics ;
- les dirigeants associatifs ayant la qualité d’élus peuvent être considérés comme des entrepreneurs de services locaux et se trouver en situation d’incompatibilité. Ils peuvent ainsi être contraints à ne pas se présenter ou à abandonner leurs mandats (CE, 26 janvier 1990, Elections municipales de Chantilly, rec. CE, p. 20 ; article L. 231,6° du code électoral) ;
- risque pénal et d’inéligibilité, essentiellement au titre de la prise illégale d’intérêts et du délit de favoritisme (art. 432-12 et 432-14 du Code pénal) ;
- risque d’illégalité pour intéressement fautif des délibérations des communes relatives à l’association (art. L2131-11 du Code général des collectivités territoriales ).
c.Question des aides d’Etat
De nombreux théâtres exerçant sous la forme d’association ont la charge de missions d’intérêt général et bénéficient à ce titre de subventions.
Ces structures sont particulièrement intéressées par la question de la conformité de leurs financements aux règles imposées par le droit communautaire, remise en lumière à l’occasion de la publication de la circulaire du 18 janvier 2010 relative aux rapports entre les pouvoirs publics et les associations (JORF n°0016 du 20 janvier 2010, p. 1138).
Ce texte propose une synthèse de la législation dite "paquet Monti – Kroes" (composé de trois textes fixant les conditions dans lesquelles les personnes publiques peuvent verser des aides afin de compenser les obligations de service public qu’elles mettent à la charge du bénéficiaire) et explicite les conditions dans lesquelles une subvention peut échapper à la qualification d’aide d’Etat au niveau communautaire, et à l’interdiction de principe des aides de nature à fausser les échanges intracommunautaires.
1.Notion d’aide d’Etat
Cette notion a été définie par la jurisprudence comme un avantage octroyé sans aucune contrepartie par une personne publique à une entreprise. Cet avantage est réputé indu car contraire aux règles du marché.
La conception de l’entreprise par les autorités communautaires est si extensive que l’immense majorité des associations gérant une activité de spectacle vivant, quand bien même l’activité serait non lucrative et d’intérêt général, doit être considérée comme des entreprises et relève donc du régime des aides d’Etat.
2.Aides interdites
Les aides d’Etat ne sont interdites que si elles affectent les échanges entre États membres et faussent où sont susceptibles de fausser la concurrence entre les opérateurs économiques (art. 107 du Traité de la Communauté européenne). Or, une association gérant un service public culturel de manière non lucrative est un opérateur économique au sens du droit communautaire.
Le juge communautaire a une lecture si extensive de cette condition qu’elle risquerait d'être le plus souvent considérée comme remplie, y compris s’agissant d’un théâtre n’ayant qu’un rayonnement local.
Toutefois, en deçà d'un seuil de 200 000 euros d'aide publique sur une période de trois ans, toutes collectivités publiques confondues, l'association bénéficie d'une présomption de non affectation du commerce intracommunautaire.
De plus, une aide affectant les échanges intracommunautaires peut être déclarée compatible avec le marché intérieur dès lors qu’elle est destinée "à promouvoir la culture […] quand elle n’altère pas les conditions des échanges et de la concurrence dans l’Union dans une mesure contraire à l’intérêt commun" (art. 107-3d du Traité de la communauté européenne). Une telle aide doit être approuvée par la Commission européenne.
Ainsi, dans une décision du 1er août 2008, la Commission a déclaré compatible la taxe fiscale sur les spectacles perçue par le Centre national de la Chanson, des Variétés et du Jazz.
3.Possibilité d’échapper au régime des aides d’Etat : les compensations d’obligations de service public
Le régime communautaire d’encadrement des aides d’Etat ne s’applique pas dans les cas où le versement s’analyse comme la compensation d’une obligation de service public.
Plus précisément, il ressort des dispositions du paquet "Monti - Kroes", reprises par la circulaire Fillon, qu’une subvention doit remplir les conditions suivantes pour échapper à l’interdiction de principe des aides d’Etat :
- le versement est accordé à une association chargée de la gestion d’un service d’intérêt économique général (l'immense majorité des entreprises de spectacle vivant bénéficiant d'aides publiques peut être considérée comme étant des services d'intérêt économique général) ;
- le bénéficiaire doit avoir été chargé de l’exécution d’obligations de service public clairement définies, au moyen d’un mandat. En France, le mandat prend généralement la forme d’une convention d’objectifs (cf. Circulaire Fillon précitée) ;
- les paramètres sur le fondement desquels la compensation a été calculée doivent avoir été préalablement établis de façon objective et transparente ;
- la compensation ne doit pas dépasser ce qui est strictement nécessaire à la couverture de tout ou partie des coûts occasionnés par l’exécution des obligations de service public ;
- le niveau de la compensation nécessaire doit avoir été déterminé sur la base d’une liste des coûts qu’une entreprise moyenne aurait à supporter compte tenu des recettes et du bénéfice raisonnable tirés de l’exécution de ces obligations (sauf marché public).
Le respect de ces conditions est contrôlé tant par le juge national que le juge communautaire.
Il convient donc de s’assurer que les subventions versées aux associations gérant une activité de théâtre peuvent être qualifiées de compensation. A défaut, l’aide sera réputée illégale.