Le salarié victime d'une maladie ou d'un accident est protégé contre les discriminations liées à son état de santé et à son absence de l’entreprise. Son contrat de travail n'est pas rompu mais simplement suspendu.
Des dispositions spécifiques sont généralement prévues dans chacune des 2 conventions collectives applicables au secteur du spectacle vivant.
On les retrouve :
- à l'art. X.4.6 de la convention collective des entreprises artistiques et culturelles pour les emplois autres qu'artistiques ;
- au titre XI de la convention collective des entreprises du secteur privé du spectacle vivant .
Cette étude traite des arrêts dus à des raisons extérieures au travail lui-même. Sinon, il s'agit d'accidents professionnels qui font l'objet d'une étude séparée (voir l'étude "Accidents du travail" ).
I.Suspension du contrat
Suspension du contrat de travail. L'absence en raison d'une maladie ou d'un accident est une cause de suspension du contrat de travail. Hors cas particuliers, le contrat de travail n'est pas rompu par l'arrêt maladie, qu'il soit à durée indéterminée ou à durée déterminée (art. L1226-1 du Code du travail ).
Information de l'employeur. Le salarié malade doit informer rapidement son employeur de la cause de son absence et la justifier par l'envoi d'un certificat médical.
Ces obligations s'imposent également en cas de prolongation de l'arrêt de travail.
A défaut de dispositions conventionnelles ou de règlement intérieur à l’entreprise, l'usage est de considérer que l'employeur doit être averti dans le même délai que la Sécurité sociale, c'est-à-dire dans les 2 jours qui suivent l'arrêt (art. L1226-1 du Code du travail ).
Retour à l'emploi. Les différences de traitement fondées sur l'inaptitude constatée par le médecin du travail, à reprendre un emploi occupé précédemment en raison de l'état de santé ou du handicap du salarié, ne constituent pas une discrimination lorsqu'elles sont objectives, nécessaires et appropriées (art. L1133-3 du Code du travail ).
II.Indemnités journalières de Sécurité sociale
La personne arrêtée peut percevoir de la Sécurité sociale des indemnités journalières (voir infra). Elles compensent, le plus souvent partiellement, la perte de salaire qui résulte de la suspension du contrat de travail.
Bases légales. Les règles relatives à l'indemnité journalière sont énoncées dans le Code de la Sécurité sociale aux articles :
Activité non autorisée. Le versement des indemnités journalières de Sécurité sociale est suspendu en cas d'exercice, pendant son arrêt de travail, d'une activité non autorisée (art. L323-6 du Code de la sécurité sociale ( ).
Par exemple, la Cour de cassation a estimé que l'exercice d'une activité sportive non autorisée par le médecin traitant était incompatible avec le versement des indemnités journalières de Sécurité sociale (Cass, civ. 9 déc. 2010 ).
a.Conditions d’attribution des indemnités journalières de Sécurité sociale
1.Cas général
a.Conditions à respecter pour les 6 premiers mois d'arrêt maladie
Le salarié doit (art. R313-3 1° du Code de la sécurité sociale ) :
- soit avoir travaillé au moins 150 heures (soit environ un mois de travail à temps plein), au cours des 3 mois ou des 90 jours précédant l'arrêt de travail ;
- soit avoir cotisé, pendant les 6 mois précédant l'arrêt de travail, sur un salaire au moins égal à 1015 fois le montant du SMIC horaire brut.
b.Conditions à respecter au-delà des 6 premiers mois
Le salarié doit remplir 2 conditions (art. R313-3 2° du Code de la Sécurité sociale ) :
- 1. Condition d'affiliation
A la date de l’arrêt de travail, justifier de 12 mois d'immatriculation en tant qu'assuré social auprès de l'Assurance maladie ; - 2. Condition de cotisation
- soit avoir travaillé au moins 600 heures (soit un peu plus de 4 mois de travail à temps plein) au cours des 12 mois ou des 365 jours précédant l'arrêt de travail ;
- soit avoir cotisé, au cours des 12 mois précédant l'arrêt de travail, sur un salaire au moins égal à 2 030 fois le montant du SMIC horaire brut au 1er janvier qui précède immédiatement le début de cette période de 12 mois.
2.Cas des professions à caractère discontinu : artistes et techniciens du spectacle
Définition des professions à caractère discontinu. "Sont considérés comme exerçant une profession à caractère discontinu les assurés ayant un statut de saisonnier, d'intérimaire ou encore d'intermittent du spectacle (...)" (Circulaire ministérielle DSS/2A/2013/163 du 16 avril 2013).
Les artistes et techniciens sont donc expressément inclus dans ces professions.
Conditions d'attribution. Ainsi, les artistes et techniciens appartenant aux professions à caractère discontinu, même sans remplir les conditions de droit commun, ont droit aux indemnités journalières de sécurité sociale (IJSS) s'ils justifient (art. R313-7 du Code de la sécurité sociale ) :
- soit avoir travaillé au moins 600 heures au cours de 12 mois civils ou de 365 jours consécutifs ;
- soit avoir cotisé, au cours des 12 mois civils précédant l'arrêt de travail, sur un salaire au moins égal à 2 030 fois le montant du SMIC horaire brut au 1er janvier qui précède immédiatement le début de cette période de référence.
Si la durée de l'arrêt est supérieure à 6 mois, le salarié doit également justifier de 12 mois d'immatriculation en tant qu'assuré social auprès de l'Assurance maladie.
La période prise en compte pour ces assurés est donc plus longue (12 mois) que pour les autres assurés (3 ou 6 mois). Cette période plus longue doit notamment permettre de tenir compte de toutes les activités exercées de manière discontinue au cours d'une année par ces salariés.
Affiliation au régime général. Les artistes du spectacle (au sens du Code du travail) dépendent du régime général de la Sécurité sociale (article L.311-3 15° Code de la sécurité sociale ).
Ils sont affiliés à la caisse d'Assurance maladie de leur lieu de résidence.
3.Cas des artistes du spectacle rémunérés au cachet
Les droits aux prestations maladie sont ouverts dès lors que l'artiste a (arrêté du 4 mai 2017 et circulaire DSS du 19 avril 2017 n°DSS/2A/5B/2017/126):
- soit cotisé sur 9 cachets au cours du trimestre civil ou des 90 jours précédant la date de repos prénatal ou la date de début de grosses en cas de maternité ;
- soit cotisé sur 36 cachets au cours des 4 trimestres civils ou des 365 jours précédant l'interruption de travail.
Ces règles s'appliquent indépendamment du nombre d'heures de travail couvertes par le cachet et mentionnées le cas échéant sur les bulletins de paie.
En cas de cumul sur la période de référence entre des rémunérations aux cachets et des rémunérations de droit commun, chaque cachet est pris en compte pour 16 heures de travail (circulaire DSS/2A/5B/2017/126).
4.Cas des demandeurs d'emplois
Pour les personnes sans emploi, le calcul s'effectue sur les derniers mois travaillés (et non sur les allocations chômage) :
"Le droit aux indemnités journalières à servir à l'assuré durant une période d'indemnisation par Pôle emploi, sera celui apprécié au jour de la date d'effet de la rupture du contrat de travail qui a précédé le chômage" (art. I de la Circulaire CNAMTS n°106/2001 du 13 août 2001 : précisions sur divers points de réglementation relatifs aux indemnités journalières de l'assurance maladie).
Pour percevoir des indemnités journalières, un demandeur d'emploi doit en outre :
- être indemnisé par l'assurance chômage (c'est-à-dire percevoir des allocations chômage) ;
- ou avoir été indemnisé au cours des 12 derniers mois ;
- ou avoir cessé son activité salariée depuis moins de 12 mois.
b.Durée maximum de versement
La durée maximum de versement des indemnités journalières de maladie (hors maladie de longue durée, prise en charge comme telle), au titre d'un ou plusieurs arrêts de travail, est fixée à 360 jours par période de 3 années calculées de date à date (art. R323-1 2° et 4° du Code de la sécurité sociale ).
c.Montant
Attestation. Pour la détermination de son montant, l'assuré doit présenter à la CPAM une attestation. Elle est établie par l'employeur ou les employeurs successifs, au moyen d’un formulaire homologué. L’attestation se rapporte aux payes effectuées pendant les périodes de référence (art. R323-10 du Code de la Sécurité sociale ).
Pour tout arrêt de travail, cette attestation doit être adressée par l'employeur à la CPAM sous forme électronique, sur le site net-entreprises (ou à défaut, sous forme papier, par le salarié auquel l'employeur aura remis l'attestation). Le format électronique est donc la règle (Décret du 28 mars 2013 ).
Calcul de l'indemnité journalière. L'indemnité journalière est égale à une fraction (taux) du salaire journalier de base (voir infra).
1.Définition du salaire journalier de base
Définition. Le salaire journalier de base est égal à la somme des salaires des 3 mois travaillés précédant l'arrêt de travail, divisée par 91,25 (art. L323-4 et R323-4 du Code de la Sécurité sociale ).
Les salaires concernés sont ceux servant de base, lors de chaque paie, au calcul des cotisation Urssaf (soit les risques maladie, maternité, invalidité et décès).
Plafond.Ce salaire est pris en compte dans la limite de 1,8 fois le SMIC.
Le plafonnement des salaires se fait en fonction de la seule valeur du SMIC en vigueur le dernier jour du mois civil précédant l'arrêt de travail (circulaire DSS/SD2/2014/370 du 30 décembre 2014).
Exemple : un salarié est en arrêt de travail à compter du 1er février 2022. Les salaires à prendre en compte sont ceux des mois de novembre 2021, décembre 2021 et janvier 2022. Le plafonnement de ces salaires à hauteur de 1,8 SMIC est fonction de la valeur du SMIC en vigueur au 31 janvier 2022.
En cas de travail discontinu (cas des salariés artistes ou techniciens intermittents du spectacle, ou des salariés embauchés en CDII), le gain journalier servant de base au calcul de l'indemnité journalière correspond à 1/365e du montant du salaire ou du gain des 12 mois antérieurs à la date de l'interruption de travail (Article R323-4du Code de la sécurité sociale ).
Par salaire brut mensuel, il convient d'entendre toutes les rémunérations prises en compte pour le calcul des cotisations de Sécurité sociale (art. L242-1 du Code de la sécurité sociale ), c'est-à-dire notamment : "toutes sommes versées à un salarié (permanent ou intermittent) en contrepartie ou à l'occasion du travail, notamment les salaires ou gains, les indemnités de congés payés, le montant des retenues pour cotisations ouvrières, les indemnités, primes, gratifications et tous autres avantages en argent, les avantages en nature, ainsi que les pourboires".
Cas particulier : calcul du salaire journalier des artistes du spectacle soumis à un abattement pour frais professionnels. Lorsqu'un artiste du spectacle a accepté l'abattement pour frais professionnels de 20 ou 25%, il est tenu compte du salaire brut non abattu perçu par l'artiste (art. R323-4 du Code de la sécurité sociale ).
d.Délai de carence
Durant les 3 premiers jours d'arrêt de travail, il n'y a pas de versement d'indemnité, c'est ce que l'on appelle le délai de carence. Le versement commence à partir du 4ème jour d'arrêt (art. R323-1 1° du Code de la sécurité sociale ). Les indemnités sont versées tous les 14 jours. En cas de reprise d'activité ne dépassant pas 48 heures entre 2 arrêts de travail, le délai de carence n'est pas appliqué pour le second arrêt.
III.Indemnité complémentaire versée par l’employeur
a.Maintien de tout ou partie du salaire
L'employeur est tenu, en vertu des dispositions légales ou conventionnelles si elles sont plus favorables, de maintenir tout ou partie de son salaire au salarié ayant une année d'ancienneté dans l'entreprise, absent pour maladie ou accident, sous réserve que ce dernier remplisse les conditions requises (art. L1226-1 du Code du travail ) :
- avoir justifié dans les 48 heures de son incapacité ;
- être pris en charge par la Sécurité sociale ;
- être soigné sur le territoire français ou dans l'un des autres Etats membres de la Communauté européenne ou dans l'un des autres Etats partie à l'accord sur l'Espace économique européen.
Ces dispositions ne s'appliquent pas aux salariés travaillant à domicile, aux salariés saisonniers, aux salariés intermittents et aux salariés temporaires.
[CCNEAC] La convention collective des entreprises artistiques et culturelles (CCNEAC) n’opère pas de distinction entre salariés permanents et intermittents et prévoit le maintien de tout ou partie du salaire dès 6 mois d’ancienneté pour les emplois figurant dans les filières administration, production, communication, relations publiques, action culturelle et technique (art. X.4.6). Rien n’étant prévu pour les emplois artistiques, ces derniers ne bénéficient pas de cet aménagement conventionnel.
Dans les départements de la Moselle, Bas Rhin et Haut Rhin, le salarié dont le contrat est suspendu pour maladie a le droit au maintien de son salaire, sans autre condition, notamment sans condition d'ancienneté. Les indemnités versées par le régime d'assurances sociales obligatoire sont déduites du montant de la rémunération versée par l'employeur (art. L1226-23 du Code du travail ).
b.Durée et taux de l’indemnité complémentaire
Certaines dispositions sont prévues les indemnités complémentaires dans les conventions collectives.
Lorsqu’il n’y a pas de précision dans les conventions, les dispositions légales s’appliquent de manière subsidiaire.
1.Taux et durée de l'indemnité conventionnelle complémentaire
Dispositions prévues dans la convention collective des entreprises artistiques et culturelles (art. X-4-6) :
[CCNEAC] La convention précise :
"- à partir de 6 mois et jusqu'à 1 an d'ancienneté, le salarié bénéficie du maintien de salaire à 100% pendant 1 mois et à 75% pendant le mois suivant ;
- au-delà de 1 an d’ancienneté le salarié bénéficie du maintien de salaire à 100% pendant 3 mois puis à 75 % pendant les 3 mois suivants".
Toutefois, rappelons que ces dispositions ne concernent que les emplois des filières administration - production, communication - relations publiques - action culturelle, technique. Rien n'est spécifié en ce qui concerne les emplois artistiques, ce sont par conséquent les dispositions légales mentionnées ci-dessous qui s'appliquent.
Dispositions prévues dans la convention collective des entreprises du secteur privé du spectacle vivant (art. XI.2 des clauses générales) :
[CCNESPSV] La convention reprend les dispositions légales prévues par l'article D1226-2 du Code du travail :
Dès lors que le salarié a une ancienneté continue dans l'entreprise d'au moins 1 an, il perçoit une indemnité complémentaire aux indemnités journalières versées par la Sécurité sociale :
- à hauteur de 90% de la rémunération nette qu'il aurait perçue s'il avait continué à travailler, pendant les 30 premiers jours ;
- à hauteur des 2/3 de la rémunération nette pendant les 30 jours suivants.
Ces durées d'indemnisation sont augmentées de 10 jours par période entière de 5 ans d'ancienneté au-delà d'une année d'ancienneté.
Dispositions prévues dans la convention collective des entreprises techniques au service de la création et de l'événement (art. 8.2) :
[Entreprises techniques au service de la création et de l'événement] "En cas d’arrêt de travail dument justifié pour cause de maladie ou d’accident non professionnel, tout salarié bénéficie, après application d’un délai de carence temporairement variable selon le secteur d’activité, d’un maintien de sa rémunération durant 90 jours dans les conditions suivantes :
- Après 12 mois d'ancienneté continue qui intègre les périodes de suspension du contrat, maintien du plein salaire pendant 60 jours, puis 75% de la rémunération brute pendant les 30 jours suivants ;
- Au-delà de 5 ans révolus d'ancienneté continue qui intègre les périodes de suspension du contrat, maintien du plein salaire pendant 90 jours".
Cette convention prévoit des dispositions spécifiques concernant la rémunération prise en compte pour le calcul de l'indemnité : "L’indemnité est calculée sur la base de la rémunération brute mensuelle fixe que le salarié aurait perçue s’il avait travaillé, hors toute part variable et prime non-conventionnelle et à l’exclusion des indemnités ayant un caractère de remboursement de frais. En particulier, doivent être prise en compte, dans le calcul de l’indemnité, les heures supplémentaires effectuées dans le service de l’intéressé durant l’absence, qu’elles donnent lieu à majoration de salaire ou bonification en repos".
2.Taux et durée de l'indemnité légale complémentaire
L'indemnité complémentaire légale correspond aux montants suivants (art. D1226-1 du Code du travail ) :
- pendant les 30 premiers jours, 90% de la rémunération brute que le salarié aurait perçue s'il avait continué à travailler ;
- pendant les 30 jours suivants, deux tiers de cette même rémunération.
Par rémunération brute, il convient d'entendre, sauf dispositions conventionnelles spécifiques, "toutes les sommes versées à un salarié (permanent ou intermittent) en contrepartie ou à l'occasion du travail, notamment les salaires ou gains, les indemnités de congés payés, le montant des retenues pour cotisations ouvrières, les indemnités, primes, gratifications et tous autres avantages en argent, les avantages en nature, ainsi que les pourboires" (art. L242-1 du Code de la sécurité sociale ).
Les durées d'indemnisation sont augmentées de 10 jours par période entière de 5 ans d'ancienneté en plus de la durée d'une année requise, sans que chacune d'elle puisse dépasser 90 jours (art. D1226-2 du Code du travail ).
Ainsi, le salarié ayant 2 ans d'ancienneté perçoit 90 % de sa rémunération pendant les 30 premiers jours de son arrêt de travail et les deux tiers de celle-ci pendant les 30 jours suivants. Chacune de ces durées d'indemnisation sera portée à :
- 40 jours entre 6 et 11 ans d'ancienneté, soit une durée totale d'indemnisation de 80 jours ;
- 50 jours entre 11 et 16 ans d'ancienneté, soit une durée totale d'indemnisation de 100 jours ;
- 60 jours entre 16 et 21 ans d'ancienneté, soit une durée totale d'indemnisation de 120 jours ;
- 70 jours entre 21 et 26 ans d'ancienneté, soit une durée totale d'indemnisation de 140 jours ;
- 80 jours entre 26 et 31 ans d'ancienneté, soit une durée totale d'indemnisation de 160 jours ;
- 90 jours à partir de 31 ans d'ancienneté, soit une durée d'indemnisation totale maximale de 180 jours.
c.Période d’indemnisation
Pour calculer l’indemnité complémentaire due au salarié il est tenu compte des indemnités déjà perçues par l'intéressé durant les 12 mois précédant l’arrêt. Le changement d'année civile n'ouvre donc pas droit à une nouvelle période d'indemnisation (art. D1226-4 du Code du travail ).
En cas d'absences pour maladie répétées, la durée totale d'indemnisation ne pourra ainsi pas dépasser celles mentionnées plus haut (ou éventuellement les périodes maximum d'indemnisation plus favorables prévues dans les conventions collectives).
[CCNEAC] Il est ainsi prévu à l'article X-4-6 de la CCNEAC que "lors de chaque arrêt de travail, il est tenu compte des indemnités déjà perçues par le salarié durant les 12 mois précédant la période de paie concernée. Si plusieurs absences pour maladie ont été indemnisées au cours de ces 12 mois, ces indemnités viendront en déduction des obligations pesant sur l’employeur en vertu de l’alinéa précédent".
Exemple :
Un salarié justifiant de 3 années d'ancienneté est en arrêt de travail pour maladie non professionnelle du 20 septembre 2022 au 10 octobre 2022 puis du 15 novembre 2022 au 20 décembre 2022. Il ne bénéficie pas de dispositions conventionnelles plus favorables que celles prévues par le Code du travail et doit donc être indemnisé de la façon suivante :
- du 20/9/2022 au 26/9/2022 : aucune indemnité complémentaire (application du délai de carence de 7 jours - voir point D ci-dessous) ;
- du 27/9/2022 au 10/10/2022 : maintien du salaire à 90 % durant 14 jours ;
- du 15/11/2022 au 21/11/2022 : aucune indemnité complémentaire (application du délai de carence de 7 jours) ;
- du 22/11/2022 au 7/12/2022: maintien du salaire à 90 % durant 16 jours ;
- du 8/12/2022 au 20/12/2022 : maintien du salaire à 66,66% durant 13 jours.
d.Délai de carence
Les conventions collectives apportent des précisions sur les délais de carence applicables. A défaut, on se reporte sur les dispositions légales, moins protectrices de la personne salariée.
Dispositions conventionnelles. La convention collective applicable peut prévoir un délai de carence plus favorable que celui institué par la loi, ou prévoir qu’il n’y en a pas.
[CCNESPSV]. La convention collective des entreprises du secteur privé du spectacle vivant prévoit que l'indemnité complémentaire est versée au salarié après un délai de carence de 3 jours continus d'arrêt de travail (art. XI.2 des clauses communes).
[Entreprises techniques au service de la création et de l'événement]. La convention des entreprises techniques au service de la création et de l'événement prévoit que "Dans le secteur du spectacle vivant, le nombre de journées de carence est fixé à 3".
[CCNEAC]. La convention collective applicable peut ne pas fixer de délai de carence. C'est notamment le cas lorsque la convention prévoit qu'en "cas d'arrêt de travail pour maladie dûment constatée, un salarié percevra, à condition d'être pris en charge par la Sécurité sociale, la rémunération qu'il aurait perçue s'il avait continué à travailler, sous déduction des prestations des organismes de sécurité sociale". Dans cette situation les juges ont décidé que le salarié pouvait prétendre au maintien de sa rémunération dans les conditions prévues par la convention dès le 1er jour d'arrêt maladie (Cass, soc. 12 mars 2002 ).
Par analogie, cette décision pourrait s'appliquer à la convention collective des entreprises artistiques et culturelles qui prévoit à son article X.4.6 qu'en "cas de maladie, tout salarié bénéficie de la subrogation et du maintien de son salaire brut, sous réserve qu'il ait effectué en temps utile auprès de la caisse de sécurité sociale les formalités qui lui incombent(...)"
Dispositions légales. La loi prévoit que l'indemnisation complémentaire des absences consécutives à une maladie ou à un accident non professionnel est due à l'issue d'un délai de carence de 7 jours. L'indemnisation complémentaire prend donc effet à compter du 8ème jour d'absence du salarié (art. D1226-3 du Code du travail ).
e.Déduction des prestations sociales et subrogation de l'employeur
Les allocations que le salarié perçoit de la Sécurité sociale et des régimes complémentaires de prévoyance sont déduites de l'indemnité complémentaire.
Cependant, les indemnités perçues des régimes complémentaires ne sont déduites que sur la part des prestations résultant des versements de l'employeur (art. D1226-5 du Code du travail ).
Par exemple, si le régime de prévoyance est financé par une cotisation supportée par l'employeur à hauteur de 60 % et par le salarié à hauteur de 40 %, l'employeur peut déduire de la rémunération maintenue 60 % des prestations versées par ce régime.
Lorsque le salaire est maintenu en totalité, l'employeur est subrogé de plein droit à l'assuré, quelles que soient les clauses du contrat, dans les droits de celui-ci aux indemnités journalières qui lui sont dues (art. R323-11 al. 3 du Code de la Sécurité sociale).
Lorsque, en vertu d'un contrat individuel ou collectif de travail, le salaire est maintenu en totalité ou en partie sous déduction des indemnités journalières, l'employeur qui paie tout ou partie du salaire pendant la période de maladie sans opérer cette déduction est également subrogé de plein droit dans ses droits aux indemnités journalières pour la période considérée, à condition que le salaire maintenu au cours de cette période soit au moins égal au montant des indemnités dues pour la même période (art. R323-11 ali. 4 du Code de la Sécurité sociale).
Ces dispositions sont d’ailleurs prévues dans certaines conventions collectives.
[CNNEAC] La convention collective des entreprises artistiques et culturelles prévoit : "Il appartient à l’employeur qui verse le salaire dans son intégralité d’en obtenir le remboursement auprès de la caisse de Sécurité sociale et de l’organisme de prévoyance complémentaire." (art. X-4-6)
[Entreprises techniques au service de la création et de l'événement] L'article 8.2 de la convention collective des entreprises techniques au service de la création et de l'événement prévoit que "les garanties définies ci-dessus (maintien de salaire) s’entendent déduction faite des indemnités versées par la sécurité sociale et des compléments éventuels versés par un régime de prévoyance".
IV.Incidences sur les congés payés
a.Acquisition de droits à congés payés
La période d’absence du salarié pour maladie (non professionnelle) n’est pas considérée comme du temps de travail effectif permettant l'acquisition de congés payés. Ce principe est rappelé par la Cour de cassation (Cass, soc. 13 mars 2013 ).
[CNNEAC] Toutefois la convention collective des entreprises artistiques et culturelles prévoit que la suspension du contrat de travail pour maladie inférieure ou égale à 1 mois n’affecte pas l’acquisition de droits à congés payés (article X.4.6).
Par ailleurs, l'absence pour cause de maladie professionnelle et d'accident de travail est assimilée à du travail effectif pour la détermination de la durée du congé payé (art. L3141-5 du Code du travail - voir étude "Congés payés" ).
b.Prise effective des congés
Concernant la prise effective des congés payés, l'incidence d’un événement extérieur, tel qu'une maladie, peut être de différentes sortes, allant de la perte des congés, au versement d’une indemnité compensatrice, en passant par leur report.
1.Maladie survenant pendant le congé
Selon la jurisprudence et l’Administration, le salarié qui tombe malade au cours de ses congés payés ne peut exiger, sauf dispositions conventionnelles plus favorables, de prendre ultérieurement le congé dont il n'a pu bénéficier du fait de son arrêt de travail, l'employeur s'étant acquitté de son obligation à son égard (Cass, soc. 4 déc. 1996 et Réponse ministérielle du 9 juillet 1990).
Il peut en revanche bénéficier du cumul entre l'indemnité de congés payés, analysée comme un salaire à paiement différé, et les prestations journalières versées par la Sécurité sociale, car chacun des deux régimes obéit à ses règles propres et procède de faits générateurs différents.
2.Maladie survenant avant le congé
a.Reprise du travail avant la fin de la période des congés payés
Il résulte de la jurisprudence de la Cour de cassation qu'en cas d'arrêt de travail survenu avant le congé, le salarié conserve l'intégralité de son droit à congé, et peut demander à en bénéficier ultérieurement.
L'employeur, à qui il incombe de fixer les dates de congés, peut toutefois lui imposer de prendre ses congés dès son retour de maladie, dans la période des congés légale ou conventionnelle (Cass, soc. 4 déc. 1996 ).
b.Reprise du travail après la fin de la période des congés payés
La Cour de cassation considère que "lorsqu'un salarié s'est trouvé dans l'impossibilité de prendre ses congés payés annuels au cours de l'année prévue par le code du travail ou une convention collective en raison d'absences liées à une maladie, un accident du travail ou une maladie professionnelle, les congés payés acquis doivent être reportés après la date de reprise du travail. Si le contrat de travail a pris fin, le salarié a droit à une indemnité compensatrice de congés payés" (Cass, soc. 24 fév. 2009. n°07-43479. Inédit et Cass, soc. 3 fév. 2010. n°07-41446. Inédit).
Attention toutefois, l'indemnité compensatrice de congés payés qui remplace le salaire ne peut être accordée que pour assurer au salarié des ressources équivalentes à son salaire perdu pendant les congés et ne peut être cumulée avec ce salaire. En conséquence, le salarié dont la rémunération a été maintenue pendant la maladie ne peut réclamer par la suite une indemnisation relative aux congés qu'il n'a pas pu prendre (Cass, soc. 8 oct. 1996. n° 93-44161. Inédit).
Les règles relatives au fractionnement sont applicables en cas de report des congés payés du fait de la maladie. Si l'employeur et la salariée conviennent de fixer la date des jours de congés payés reportés en dehors de la période légale (du 1er mai au 31 octobre), des jours de congés supplémentaires seront accordés au salarié et calcul selon la méthode de l'article L3141-19 du Code du travail ( ) :
"Lorsque le congé principal est d'une durée supérieure à douze jours ouvrables , il peut être fractionné avec l'accord du salarié. Cet accord n'est pas nécessaire lorsque le congé a lieu pendant la période de fermeture de l'établissement.
Une des fractions est au moins égale à douze jours ouvrables continus compris entre deux jours de repos hebdomadaire."
Si les congés payés reportés sont pris pendant la période légale, ils ne donnent lieu à aucun jour de congés supplémentaires (voir question parlementaire n°74829 sur le report des congés payés et les jours de fractionnement, publiée au JO Assemblée nationale du 19 octobre 2010 et voir étude "Congés payés" ).
V.Incidences sur le régime d’assurance chômage
a.Versement de l’allocation chômage
En raison du principe de non cumul entre indemnité chômage et indemnité de Sécurité sociale, le salarié indemnisé au titre de l’assurance chômage verra son allocation cesser au profit de l’indemnité de Sécurité sociale durant la période de son congé maladie (art. R323-2 Code de la sécurité sociale ).
b.Conditions d’affiliation à l’assurance-chômage
Les périodes de suspension du contrat de travail dues à la maladie sont retenues à raison d’une journée d’affiliation par journée de suspension ou, lorsque la durée d’affiliation est calculée en heures, à raison de 5 heures de travail par journée de suspension.
Les périodes de prise en charge par l'assurance maladie, situées en dehors du contrat de travail, allongent d'autant la période au cours de laquelle est recherchée la condition d'affiliation.
1.Application dans le régime général
Pour la recherche des 130 jours d’affiliation ou 910 heures de travail au cours des 24 mois qui précèdent la fin du contrat de travail, la période de congé maladie comptera pour 1 jour d’affiliation par journée de suspension du contrat de travail. En dehors de tout contrat de travail, la période d’arrêt maladie décalera d’autant la période de référence de 24 mois.
(Règlement général annexé à la Convention du 14 mai 2014 / Titre 1er - L’allocation d'aide au retour à l'emploi / Chapitre 2 - Conditions d'attribution / Art. 3).
2.Application dans le régime spécifique des intermittents du spectacle
Sur les 507 heures de travail requises sur 12 mois, la période de congé maladie comptera pour 5 heures de travail par journée de suspension du contrat.
La période de prise en charge par l’assurance maladie située en dehors du contrat de travail décale d’autant la période de référence.
Pour le technicien ou l’artiste qui ne remplit pas les conditions d’affiliation pour une réadmission au titre de l’allocation d'aide au retour à l'emploi (ARE) mais qui a été en longue maladie prise en charge à 100% par la Sécurité sociale (art. 160-4 du Code de la Sécurité sociale ), ces heures peuvent être assimilées à hauteur de 5 heures de travail par jour pour une ouverture de droits au titre de l’APS (Allocation de Professionnalisation et de solidarité) (annexes VIII et X à la convention d'assurance chômage, art. 3 § 3).
c.Calcul de l'allocation journalière
Le revenu de remplacement est calculé sur la base de la rémunération habituelle du salarié. Ainsi, si dans la période de référence sont comprises des périodes de maladie n'ayant pas donné lieu à une rémunération normale, ces rémunérations ne sont pas prises en compte dans le salaire de référence.
(Règlement général annexé à la Convention d'assurance chômage du 14 mai 2014 - titre 1 - Chapitre 4 - Section 1 - Salaire de référence - art. 12).
Les périodes d’arrêt maladie au titre d’une affection de longue durée indemnisée à 100 % par la Sécurité sociale (voir supra, V.b.2) sont prises en compte pour le calcul du salaire annuel de référence (Annexe VIII du règlement d’assurance chômage, Titre 1 - Chapitre 4 - Section 1 Salaire de référence - art. 11).